Arabes du Christ


" الهجرة المسيحية تحمل رسالة غير مباشرة للعالم بأن الإسلام لا يتقبل الآخر ولا يتعايش مع الآخر...مما ينعكس سلباً على الوجود الإسلامي في العالم، ولذلك فإن من مصلحة المسلمين، من أجل صورة الإسلام في العالم ان .... يحافظوا على الوجود المسيحي في العالم العربي وأن يحموه بجفون عيونهم، ...لأن ذلك هو حق من حقوقهم كمواطنين وكسابقين للمسلمين في هذه المنطقة." د. محمد السماك
L'emigration chretienne porte au monde un message indirecte :l'Islam ne tolere pas autrui et ne coexiste pas avec lui...ce qui se reflete negativement sur l'existence islamique dans le monde.Pour l'interet et l'image de l'Islam dans le monde, les musulmans doivent soigneusement proteger l'existence des chretiens dans le monde musulman.C'est leur droit ..(Dr.Md. Sammak)

mercredi 28 décembre 2016

En Syrie, avec l’évêque qui ne veut pas fuir - La Croix

En Syrie, avec l'évêque qui ne veut pas fuir - La Croix

En Syrie, avec l'évêque qui ne veut pas fuir

Alors que des milliers de chrétiens ont fui le nord de la Syrie, attaqué par les hommes de Daech en 2015, La Croix a passé Noël avec l'archevêque de Hassaké-Nisibe, qui a choisi de rester, envers et contre tout.

Mgr Jacques Behnan Hindo, archevêque de Hassaké-Nisibe, célèbre la messe dans le sous-sol de l'église Sainte-Marie de Hassaké, dont la construction a été interrompue par la guerre.
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Mgr Jacques Behnan Hindo, archevêque de Hassaké-Nisibe, célèbre la messe dans le sous-sol de l'église Sainte-Marie de Hassaké, dont la construction a été interrompue par la guerre. / Chris Huby/Pictorium

Dans le nord de la Syrie, Mgr Jacques Behnan Hindo, 75 ans, fait figure de résistant de la communauté syrienne-catholique. L'archevêque de Hassaké-Nisibe a décidé de ne jamais quitter son pays. « Depuis 1 400 ans, nous sommes menacés de martyre. Tant qu'il y aura un chrétien, je resterai. Je partirai le jour où il n'y aura plus personne. Certains évêques m'ont recommandé de partir ou bien de me taire, mais je ne peux pas quitter ma vie, je ne peux pas me quitter moi-même. »

Depuis son bureau, les tirs de kalachnikov résonnent à quelques rues. « Vous entendez ? Les rues sont vides car les gens savent que cela peut éclater à tout moment. À chaque fois qu'il y a des affrontements, ils ont lieu dans le quartier des six églises », s'insurge Mgr Hindo, qui regrette que ces affrontements terrorisent les fidèles qui n'osent plus se rendre à la messe par crainte d'être pris pour cible. « Il y a encore des gens qui y croient, c'est ce qui me pousse à rester. »

> Voir notre carte sur les chrétiens au Moyen-Orient

En cette nuit de Noël, ceux qui y croient toujours se sont rendus par dizaines dans le sous-sol de l'église Sainte-Marie, où l'archevêque a célébré la messe. Depuis le début du conflit, la construction de l'église a été arrêtée. « C'est important pour nous d'apporter un peu de gaieté à notre communauté et particulièrement à nos enfants, qui vivent dans une ambiance morose depuis cinq ans. » Cette année encore, les syriens-catholiques ont fêté Noël à Hassaké. Qu'en sera-t-il l'année prochaine ? La question est dans tous les esprits.

« Je me suis engueulé avec Dieu »

En 2015, la communauté syrienne-catholique a été victime d'une tentative de génocide de la part des membres de Daech. En quelques heures, des centaines de familles ont dû quitter précipitamment leurs villages situés sur la vallée du Khabour. Depuis, le nombre de fidèles s'est considérablement réduit.

> Lire aussi : Les forces kurdes se rapprochent de Rakka, fief syrien de Daech

« Dans la vallée, il ne reste plus que trois prêtres, reprend Mgr Hindo. Ils sont restés par conviction. L'évêque syrien-orthodoxe est parti lui aussi. 90 % des chrétiens de la région veulent partir. Pour être honnête, lors de l'attaque contre nos villages du Khabour, je me suis demandé : "Où est Dieu ?" Je me suis engueulé avec lui, ou bien c'est lui qui m'a engueulé, mais je n'ai jamais perdu la vision du Christ sur la croix. C'est cette image qui me soutient. »

À Hassaké, on ne compte plus les check-points installés par les Kurdes des unités de protection du peuple (YPG) ou par les soldats fidèles au président Bachar Al Assad. En août 2015, la ville a été le théâtre d'affrontements intenses entre les forces kurdes et celles de l'armée loyaliste. Dans les rues qui jouxtent l'archevêché, les murs portent encore les stigmates des affrontements.

« Je ne me défendrai pas »

Devant les hautes grilles de l'église, deux jeunes combattants kurdes montent la garde. Mgr Hindo ne cache pas son amertume. « Les YPG ne protègent pas l'église. Tout cela, c'est une mascarade pour mieux surveiller mes faits et gestes. Je n'accepte pas d'armes dans l'enceinte de l'archevêché. Je ne suis pas armé et je ne le serai jamais. Si on doit me tuer, je ne me défendrai pas. »

> Retrouvez notre dossier Syrie

Matthieu Delmas (à Hassaké, Syrie)



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Raï : Le pays a besoin de réconciliation nationale - L'Orient-Le Jour

Raï : Le pays a besoin de réconciliation nationale - L'Orient-Le Jour

Raï : Le pays a besoin de réconciliation nationale

Les divers prélats ont exhorté les responsables à mettre fin à leurs divisions et à pallier les difficultés touchant au quotidien des Libanais.

Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a appelé dimanche à une réconciliation nationale qui mettrait fin aux dissensions politiques, à la pauvreté et à la corruption, insistant par ailleurs sur le retour des déplacés syriens dans leur pays.
Mgr Raï s'exprimait à Bkerké, lors de la messe de Noël qu'il a célébrée, avec la participation de l'ancien patriarche maronite Nasrallah Sfeir, des évêques Boulos Sayyah, Aad Abi Karam, Samir Mazloum, et du nonce apostolique, Gabriel Caccia, en présence notamment du président de la République, Michel Aoun, et de son épouse, du ministre de la Culture, Ghattas Khoury, représentant le chef du gouvernement, Saad Hariri, des anciens présidents Amine Gemayel et Michel Sleiman, du ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, et d'un grand nombre de députés et de personnalités du monde sécuritaire et judiciaire.
« Nous souhaitons que votre mandat réussisse à réaliser une réconciliation nationale renforcée par un esprit d'amour et de partenariat, afin que se dissipent les ténèbres générées par les conflits », a lancé Mgr Raï à l'adresse du président de la République, estimant que l'entente globale contribuerait à « sortir le peuple de la pauvreté et (à) éviter la désintégration de la société ». Le patriarche maronite a dans ce cadre appelé à « faire cesser la corruption, la dégradation de l'environnement naturel et social, l'évasion fiscale, le gaspillage, les dépenses non contrôlées et le recrutement arbitraire des fonctionnaires, basé sur le clientélisme confessionnel et politique ».

Le retour des déplacés
Se penchant sur les problèmes créés par la présence des déplacés syriens, le patriarche maronite a affirmé que « la sécurité au niveau social nécessite de parer au danger dû à la présence de deux millions de déplacés ». Il a estimé que « cette situation menace la stabilité intérieure et prive les Libanais de leur pain quotidien », soulignant qu'« elle constitue un lourd fardeau pour l'État et le peuple ». Et Mgr Raï d'appeler à « œuvrer sérieusement avec la communauté internationale en vue de rapatrier les déplacés et de leur fournir des aides sur leur territoire », estimant que cette démarche « leur restituera leurs droits et leur dignité ».
Le patriarche maronite s'est par ailleurs félicité de l'élection présidentielle, estimant que l'entente de toutes les composantes politiques autour du choix de Michel Aoun reflète leur certitude quant à l'aptitude de ce dernier à « consolider l'État de droit et des institutions ». Il a ajouté que cette situation favorable a été consolidée par la formation du gouvernement, qualifiant celui-ci de « rassembleur, dans la mesure où il représente toutes les composantes du pays et constitue la preuve que le Liban est une terre de pluralité et de dialogue ».

Aoun : Nous travaillerons dur
Avant la célébration de la messe et après un aparté avec le patriarche, M. Aoun a exprimé, devant les journalistes, son engagement à « œuvrer en vue de concrétiser les espoirs des Libanais et répondre à leurs attentes », soulignant que « pour satisfaire les vœux des citoyens, l'action du gouvernement se fera à pas étudiés et rapides mais non précipités ».
« Nous travaillerons dur afin de combler les nombreuses lacunes qui sévissent à ce jour », a poursuivi le président de la République, promettant enfin que « les postes vacants seront remplis par des personnes compétentes et honnêtes ».

Vœux de Noël
Pour sa part, le président de la Chambre, Nabih Berry, a pris contact dimanche avec Mgr Raï, lui exprimant ses vœux à l'occasion de Noël. Une délégation du mouvement Amal devait se rendre plus tard à Bkerké dans le même but.
Jusqu'à hier, le patriarche maronite continuait de recevoir les vœux de différentes personnalités du monde religieux et social, accueillant ainsi une délégation d'ulémas chiites, ainsi que les responsables du Hezbollah pour les régions du Nord, de Jbeil-Kesrouan, et du Metn, Rida Ahmad, Ali Berro et Chawki Zeaïter.
Également parmi les hôtes de Bkerké, Fadi Romanos, membre de la Fondation maronite dans le monde, ainsi qu'une délégation du comité de coordination entre l'Université libanaise et le patriarcat maronite.
Mgr Raï a par ailleurs reçu un appel téléphonique du cheikh Akl druze, Naïm Hassan, qui lui a transmis ses vœux pour Noël.



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lundi 26 décembre 2016

Chrétiens d'Irak : le patriarche chaldéen demande l'aide de la communauté internationale - L'Orient-Le Jour

Chrétiens d'Irak : le patriarche chaldéen demande l'aide de la communauté internationale - L'Orient-Le Jour

Chrétiens d'Irak : le patriarche chaldéen demande l'aide de la communauté internationale

"Si les chrétiens veulent protéger leurs villes, ils doivent s'engager dans l'armée ou avec les peshmergas (combattants kurdes, ndlr). Les milices, c'est l'anarchie", assène Louis Raphaël Sako.

En attendant une reprise de Mossoul aux jihadistes, le patriarche chaldéen Louis Raphaël Sako a demandé, dans un entretien avec l'AFP, l'aide de la communauté internationale avant d'appeler les chrétiens d'Irak à rentrer chez eux.

"Il y avait une grande joie au début de la libération de Ninive parmi les chrétiens. Mais comme la bataille se prolonge, il y a une attente avec de la peur mais aussi de l'espoir", expliquait à la veille de Noël Mgr Sako, le chef de l'Église chaldéenne d'Orient, l'une des Eglises catholiques orientales.

Lancée le 17 octobre pour reprendre au groupe jihadiste Etat islamique (EI) la plaine de Ninive et sa capitale Mossoul (nord), l'offensive de l'armée irakienne, soutenue par une coalition internationale, a permis la prise de nombreux quartiers de l'Est de Mossoul mais butte sur la résistance de l'EI qui contrôle toujours les quartiers Ouest de la deuxième ville d'Irak. Et, même si la plupart des villes à majorité chrétienne de la plaine de Ninive ont été reprises, d'autres, comme Tal Kayf à 15 km au nord de Mossoul, restent aux mains des jihadistes depuis plus de deux ans.

(Lire aussi : Premier Noël dans une église du nord irakien après deux ans d'occupation jihadiste)

"Dégâts immenses"
Or, souligne le patriarche, "dans les villages libérés, les dégâts sont immenses. J'ai visité ces villages, ils sont détruits entre 30 et 40%. Les églises ont été endommagées, les routes et les infrastructures aussi".
Mais avant d'envisager une quelconque reconstruction, avant même d'appeler les habitants à rentrer chez eux, Mgr Sako souhaite une reprise de Mossoul, car "si Mossoul n'est pas libérée, alors Daech (acronyme arabe de l'EI, ndlr) peut s'infiltrer dans les villages et semer la panique", prévient-il.

Il implore par ailleurs ses coreligionnaires de ne pas rejoindre les milices chrétiennes des "Brigades de Babylone". Ces forces supplétives font partie du Hachd al-Chaabi, dont le noyau dur est constitué de milices chiites soutenues par l'Iran mais qui comprend aussi des groupes sunnites et chrétiens.
"Si les chrétiens veulent protéger leurs villes, ils doivent s'engager dans l'armée ou avec les peshmergas (combattants kurdes, ndlr). Les milices, c'est l'anarchie", assène Mgr Sako.

Forte de plus d'un million de personnes avant la chute de Saddam Hussein en 2003, la communauté chrétienne d'Irak s'est réduite comme peau de chagrin à moins de 350.000 âmes, la faute aux violences récurrentes qui ensanglantent le pays depuis. Les Chaldéens représentent la majorité des chrétiens d'Irak.


(Lire aussi : L'avenir incertain des chrétiens de Mossoul...)

Réconciliation
La prise de la plaine de Ninive et d'une bonne partie de l'Ouest de l'Irak par l'EI en 2014 a encore aggravé l'hémorragie. A leur arrivée, les jihadistes ont laissé trois options aux chrétiens: se convertir, payer une forte taxe ou mourir. Environ 120.000 d'entre eux ont pris la fuite.
Et Mgr Sako ne conçoit pas de laisser les chrétiens livrés à eux-mêmes une fois revenus chez eux. "Nous avons demandé des garanties de la communauté internationale", explique-t-il.
"Il faudrait une sorte de bureau de contrôle de l'Onu ou de l'Union européenne pour surveiller les choses et ne pas renvoyer les gens sans protection dans leurs villages", assène-t-il.
Et de proposer un système de parrainage des villages chrétiens par les pays de l'UE. "Chaque pays prendrait en charge la reconstruction d'un village. Cela encouragerait les habitants qui se sont réfugiés en Europe à rentrer chez eux", avance le patriarche.

Mais la reconstruction puis la réconciliation passent aussi, selon lui, par un dialogue au niveau national dans ce pays mosaïque où cohabitent les religions musulmane et chrétienne et les populations arabe, kurde, yazidie ou turkmène. Au sein du gouvernement national, dirigé par le chiite Haider al-Abadi, et des autorités religieuses musulmanes, "le discours commence à changer", assure Mgr Sako. "Les autorités religieuses (musulmanes, ndlr) ont dit que c'était bien de fêter Noël avec les chrétiens".
A cette occasion, M. Abadi a d'ailleurs envoyé un message à ses concitoyens chrétiens, mettant en avant la "fierté que nous fait ressentir la diversité religieuse" de l'Irak.

Lire aussi
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Le grand exode des chrétiens du Moyen-Orient

Le grand exode des chrétiens du Moyen-Orient
Le Figaro du 26:12:3016
Le grand exode des chrétiens du Moyen-Orient

Le début de ce siècle a vu se poursuivre et s'accélérer le grand exode des chrétiens du Moyen-Orient. Alors qu'ils représentaient avant la Première Guerre mondiale environ 20 % de la population de la région, les chrétiens de toute obédience ne sont plus, cent ans plus tard, que 2 ou 3 %. Taux de natalité plus faible et plus forte tendance à l'émigration sont les principales raisons avancées par les démographes pour expliquer le déclin de la présence chrétienne sur les terres où est née cette religion. Mais les persécutions perpétrées sous des prétextes divers par la majorité musulmane sont largement responsables de cet exil.

Souvent annoncée, la disparition de communautés entières est devenue une réalité. En Irak, la grande majorité des chrétiens restants sont des déplacés intérieurs. Pour la première fois en deux mille ans, il n'y a plus de chrétiens à Mossoul ni dans la majeure partie de la Mésopotamie. Chassés par l'État islamique, les habitants assyriens et chaldéens de la plaine de Ninive vivent depuis deux ans dans des caravanes dans des camps de réfugiés au Kurdistan. Ils ont ces derniers mois subis un deuxième choc. La libération de leurs villes et de leurs villages s'est accompagnée de la découverte de leurs églises profanées et de leurs maisons pillées par des militants de l'État islamique, souvent venus des villages voisins.

La politique de nettoyage confessionnel de l'État islamique a largement fonctionné. La plupart des chrétiens de Ninive ne retourneront pas chez eux ou seulement pour vendre leur terre ou leur maison, avant de s'installer définitivement au Kurdistan ou d'émigrer vers l'Europe, l'Australie ou l'Amérique du Nord. Dernier avatar historique de l'islam radical et conquérant, l'organisation djihadiste a achevé un mouvement commencé par d'autres acteurs, étatiques ou non. Ce phénomène peu ordinaire, qui a vu la première religion mondiale peu à peu évincée des terres qui l'ont vu naître, s'est déroulé par étapes, souvent sous les yeux de la chrétienté occidentale.

Les pogromes antichrétiens du XIXe siècle se transforment au début du XXe siècle, changeant à la fois d'échelle et de nature. Le grand massacre des Arméniens et des Assyriens en 1915, décidé et organisé par les Ottomans, et perpétré avec l'active collaboration des Kurdes qui s'emparent de terres des chrétiens dans l'est de la Turquie, est le premier génocide du siècle. Il a pour résultat l'éradication presque totale du christianisme du territoire de la Turquie moderne.

Un conflit complexe et long de quinze ans

Ce génocide est suivi, juste après la Première Guerre mondiale, par un autre phénomène d'ampleur historique: l'expulsion des Grecs d'Asie mineure en 1922 (alors qu'une partie des Turcs sont chassés des Balkans), qui voit la disparition des églises les plus anciennes de l'histoire, fondées par les premiers apôtres.

Le phénomène se poursuit à l'ère des États-nations créés sur les ruines de l'Empire ottoman. Plus proche de nous, la guerre du Liban marque la fin du seul État à dominante chrétienne du Moyen-Orient. Souvent vu en Occident comme une guerre civile entre des révolutionnaires «islamo-progressistes» et un camp chrétien présenté comme conservateur et fascisant, ce conflit complexe et long de quinze ans s'achève par la défaite des chrétiens, qui perdent leur prédominance politique sur le Liban au profit des musulmans sunnites et chiites. Les chrétiens sont aussi chassés de régions entières du Liban, le Sud et la Bekaa, massacrés dans le Chouf.

Si les communautés chrétiennes du Liban, et notamment les maronites, demeurent parmi les plus florissantes de la région, la fragilité de l'équilibre libanais interdit de penser que le répit qu'elles connaissent soit garanti dans l'avenir. Contraints de s'allier aux dictatures sous peine d'être persécutés par les islamistes, comme en Syrie, les chrétiens sont régulièrement pris comme boucs émissaires. «Leur histoire glorieuse, écrit l'historien Jean-Pierre Valognes dans son monumental ouvrage Vie et mort des chrétiens d'Orient, fut occultée et travestie, au point que, sur la terre dont ils étaient les anciens propriétaires, ils finirent par être traités en hôtes plus ou moins tolérés, quand ce n'est pas en étrangers.»

«Si leur disparition complète est improbable, continue l'historien, on peut penser qu'ils se réduiront à une somme d'individualités hors d'état de maintenir la vie communautaire indispensable à la préservation de leur identité. (…) C'est dire que ce qui faisait leur richesse n'aura plus court. (…) Le Moyen-Orient arabe y gagnera l'homogénéité religieuse que sa vision théologique suppose. (…) Il y perdra les atouts du pluralisme, ce dont les islamistes n'ont cure.»

dimanche 25 décembre 2016

N'oublions pas les chrétiens d'Orient | Valeurs Actuelles

N'oublions pas les chrétiens d'Orient | Valeurs Actuelles

N'oublions pas les chrétiens d'Orient

Une chrétienne de Qaraqosh, à quelques kilomètres de Mossoul, en Irak, vient prier dans l'Eglise détruite par les bombes, début décembre 2016. Photo ©AFP
Une chrétienne de Qaraqosh, à quelques kilomètres de Mossoul, en Irak, vient prier dans l'Eglise détruite par les bombes, début décembre 2016. Photo ©AFP

La nativité à Bethléem, la Judée-Samarie, la fuite en Egypte... Autant d'épisodes, de noms et de lieux qui ne manqueront pas de résonner dans l'esprit ou les souvenirs d'enfance de beaucoup d'entre nous en cette veillée de Noël. L'occasion toute trouvée aussi pour avoir une pensée pour les chrétiens d'Orient, ces oubliés du christianisme qui sont pourtant, comme en atteste elle-même l'histoire de Jésus, les premiers chrétiens et bien souvent les descendants des anciens peuples du Proche-Orient.

Preuve qu'il y a des raisons d'espérer en ce début de XXIe siècle si gorgé de sang, ces minorités ont réussi pendant des siècles à coexister pacifiquement avec l'islam, à l'instar d'autres groupes ethno-religieux restés imperméables à la conquête arabe. Les régimes nationalistes arabes, souvent laïcs, leur avaient même fait parfois une place enviée, dans l'administration ou l'armée. Exemple symbolique : l'ancien ministre des Affaires étrangères de Saddam Hussein, Tarek Aziz, mort l'année dernière en captivité où l'avaient emmené les persécutions des chiites irakiens contre les chrétiens accusés collectivement de collaboration avec l'ancien dictateur.

Car depuis 2003, l'invasion américaine de l'Irak est malheureusement passée par là avec son cortège de vengeances et d'exacerbation des haines interconfessionnelles. Désormais, les chrétiens d'Irak n'ont plus aucun allié, la chute du régime autoritaire de Saddam, un régime certes sanguinaire, ayant signé leur arrêt de mort comme minorité nationale.

Les coptes d'Egypte, dont d'aucuns considèrent qu'ils ont pour lointains aïeux les anciens Egyptiens, sont aussi confrontés à la résurgence de l'intolérance religieuse : eux qui sont les héritiers d'une des toutes premières civilisations chrétiennes, parmi les plus brillantes durant les premiers siècles de notre ère, connaissent de nouveau les attentats à la bombe jusque dans leurs églises. Le régime militaire, qui a heureusement chassé les islamistes de Morsi, affirme les protéger mais sa sincérité comme sa résolution semblent fragiles...

Autre pays comptant beaucoup de chrétiens des origines, la Syrie a su échapper au chaos du djihadisme : pas seulement de Daech, mais aussi de la rébellion, en réalité complètement phagocytée par Al-Qaïda et ses séides. Les chrétiens de Syrie, à l'instar des autres minorités, religieuses ou ethniques qui font face aux sunnites arabes majoritaires, ne s'y sont d'ailleurs pas trompés : tout dictatorial et féroce qu'il soit, seul le régime de Bachar les laisse en paix et leur garantit de n'avoir pas à faire le faux choix si souvent imposé ces derniers temps à leurs coreligionnaires au Proche-Orient : la conversion, la valise ou le cimetière.

Espérons que la fin de la guerre civile va permettre un retour à une forme de normalité synonyme de fin des violences. Il est vrai que la partie est encore loin d'être gagnée... Mais désormais, après cinq ans d'interminable guerre civile, on peut sérieusement envisager la reconstruction d'une paix où les chrétiens retrouveront toute leur place. Ils sont nombreux - plus d'un million - à avoir fui le pays et à avoir été accueillis ailleurs, notamment en France qui s'est honorée d'ouvrir ses portes à quelques milliers d'entre eux. Ils seront sans doute aussi très nombreux à vouloir regagner un pays, le leur, dont ils n'ont jamais voulu s'exiler.

Cela a été permis par la victoire du régime que l'ensemble de la communauté internationale doit désormais accompagner pour qu'il invente une nouvelle gouvernance et favorise le retour de tant de réfugiés chassés aux quatre coins du Proche-Orient et de l'Europe.

La reconstruction de la région, sa stabilisation durable, sera à ce prix. Un chantier formidable pour la France, dont la politique étrangère depuis une dizaine d'années n'a pas brillé par sa clairvoyance et son courage, c'est le moins qu'on puisse dire...

La réconciliation avec la Russie – autre puissance historique protectrice, avec la France, des chrétiens d'Orient – comme la réaffirmation d'une diplomatie plus autonome vis-à-vis des Etats-Unis et des va-t-en guerre droits-de-l'hommistes de Bruxelles, sont deux priorités absolues que je fixe à notre action extérieure. Ce sera l'un des enjeux majeurs du grand rendez-vous de 2017 !

samedi 24 décembre 2016

France-Monde | Les chrétiens, martyrs d’Orient

France-Monde | Les chrétiens, martyrs d'Orient

« Ce qu'il s'est produit a marqué ma famille à vie. Nous pensons de plus en plus à quitter le pays. Mais nous sommes nés ici et je ne vois pas mon avenir ailleurs. » Sherif Milad, 36 ans, patron d'entreprise au Caire, la capitale égyptienne, a perdu sa tante et une cousine dans l'attentat d'une église copte, en pleine messe, le 11 décembre dernier.

La survie des chrétiens d'Orient est-elle compromise ? En Égypte, où l'on compte plus de 8 millions de coptes (soit environ 10 % de la population totale) et donc la plus forte communauté chrétienne d'Orient, la question se pose en ce jour de réveillon en particulier mais déjà depuis des années. Selon l'organisation non gouvernementale internationale Human Rights Watch, au moins 42 églises ont été brûlées ou vandalisées depuis l'été 2013, ainsi que des dizaines d'écoles, de maisons et de commerces appartenant à des coptes. Le sujet est plus épineux encore depuis qu'un kamikaze s'est fait sauter à l'intérieur de l'église Saint-Pierre et Saint-Paul, contiguë à la cathédrale copte Saint-Marc, siège du pape de l'Église copte orthodoxe Tawadros II. L'attaque-suicide, revendiquée par le groupe État islamique, a fait plus de 25 morts et une cinquantaine de blessés.

Fêtes annulées

Nouvelle onde de choc, donc, dans la capitale, à laquelle ont succédé la colère, les manifestations, puis, rapidement, le silence. « Et la tristesse sur les visages », assure Camelia Metias, 39 ans, elle aussi copte du Caire. « Cette tristesse est plus forte encore depuis qu'on a appris le décès, mercredi, d'une enfant âgée de 10 ans hospitalisée dans un état grave. »

Cette semaine, en signe de solidarité pour les coptes orthodoxes, c'est toute la communauté catholique d'Égypte qui a décidé d'annuler les fêtes de Noël. Concerts et autres rassemblements ont ainsi été supprimés dans toutes les paroisses du pays. « Nous n'avons pas d'autres armes que la prière », affirme l'ancien recteur – pendant 17 ans – de la mission copte-catholique à Paris, Mgr Michel Chafik.

Prier ou partir

Malgré les explosions meurtrières et autres enlèvements d'« innocents », l'homme d'église encourage tous les chrétiens d'Orient, quels qu'ils soient et d'où qu'ils soient, à rester dans leur pays. « Nous sommes des autochtones. Nos pays ne peuvent pas vivre sans chrétiens. Avec les musulmans, nous ne formions qu'un seul peuple. Mais depuis les années 1970 et l'arrivée du pétrodollar, les mauvais esprits se sont installés et, parallèlement à ce coran qui voulait moderniser l'islam et qui a échoué, nous nous sommes retrouvés confrontés à un deuxième coran qui, lui, voudrait islamiser la modernité. »

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Raï : Changer de confession dans le but de divorcer ne relève pas de la liberté de croyance - L'Orient-Le Jour

Raï : Changer de confession dans le but de divorcer ne relève pas de la liberté de croyance - L'Orient-Le Jour

Raï : Changer de confession dans le but de divorcer ne relève pas de la liberté de croyance

L'ouverture, à Bkerké, de l'année judiciaire des tribunaux ecclésiastiques.

Le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, a déploré hier la pratique du changement de confession à laquelle ont recours les couples maronites pour divorcer, estimant que cette ruse ne fait pas partie de la liberté de croyance.
Mgr Raï s'exprimait lors de l'ouverture de l'année judiciaire des tribunaux ecclésiastiques maronites, en présence notamment du président du tribunal maronite de première instance, le vicaire patriarcal Hanna Alouane, et de tous les juges membres des tribunaux maronites.
« On ne peut considérer comme une liberté de croyance ou de conscience l'intention de changer de confession ou de religion dans le but d'obtenir le divorce et de rompre les liens sacrés du mariage », a déclaré Mgr Raï, soulignant que « les couples maronites qui, pour divorcer, veulent changer de confession pour un autre rite chrétien ou pour la religion musulmane propagent un fléau douloureux. Que ces couples sachent qu'en changeant de confession ou de religion, ils méprisent leur Église ainsi que les autres Églises auxquelles ils s'affilient, ou encore la communauté musulmane qu'ils choisissent », a martelé le patriarche maronite, estimant que « cette pratique est un péché vis-à-vis de l'engagement pour la foi en l'Église maronite ».
Mgr Raï a d'autre part affirmé que, d'un point de vue légal, cette tactique est « une enfreinte à la loi du 2 avril 1951 qui stipule que l'autorité ecclésiastique compétente pour juger du contrat de mariage et de ses conséquences est l'autorité auprès de laquelle le mariage a été conclu ». Il a en outre estimé que les juges ecclésiastiques « ne doivent pas permettre aux avocats qui facilitent le changement de confession de se présenter devant eux, ce en vertu de la loi et du règlement intérieur qui régit les tribunaux religieux ».

Pastorale efficace
Tirant la sonnette d'alarme, le cardinal a déploré que « l'appellation "mariage maronite", utilisée pour désigner une union indéfectible de deux personnes ou de deux groupes, est aujourd'hui en danger, en raison du manque de pratique religieuse, de l'expansion du matérialisme et de la perte des valeurs spirituelles, humaines et morales ».
Mgr Raï a en outre dénoncé « la ruée effrayante vers les tribunaux en vue d'obtenir l'annulation de mariages et l'absence de prise en compte de la valeur du sacrement et de l'engagement fait par les mariés devant Dieu et à l'égard de leurs enfants », affirmant qu'« il y a un besoin urgent d'une pastorale efficace et approfondie dans les évêchés, afin de dynamiser les centres de préparation au mariage et les centres d'écoute et d'accompagnement de couples en difficulté, qui aideraient à régler les conflits avant qu'ils ne s'aggravent ».
Dans le même esprit, le prélat maronite a exhorté les juges ecclésiastiques à « aider les couples mariés en proie aux disputes à renforcer leur entente et leur réconciliation, et (à) épargner à leurs enfants les dommages affectifs », affirmant que « la pastorale du mariage ne se confine pas aux évêques et aux prêtres de paroisse, mais elle constitue un devoir des tribunaux, des juges et des fonctionnaires de justice ».



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jeudi 22 décembre 2016

Le Liban, une terre d’espoir pour les chrétiens d’Orient | Valeurs Actuelles 16/12/2016

Le Liban, une terre d'espoir pour les chrétiens d'Orient | Valeurs Actuelles

Le Liban, une terre d'espoir pour les chrétiens d'Orient

Scène de liesse à Beyrouth au moment de l'élection du général Aoun à la présidence de la République, le 31 octobre 2016. Photo © REUTERS

Feux d'artifice et coups de Klaxon dans Beyrouth la pluriconfessionnelle. Des drapeaux aux fenêtres et des cris de joie, quelque chose qu'en France on ne verrait qu'après un match de football. L'émoi suscité par l'élection de Michel Aoun, en ce dernier jour d'octobre, dépasse volontiers les limites d'Achrafieh, quartier chrétien de l'est de la capitale libanaise. Reproduit à l'infini sur les affiches qui tapissent les grandes artères, le visage de l'ancien héros de la guerre civile semble apaiser et réconcilier sunnites, chiites et chrétiens. Ces derniers, que la Constitution charge, depuis 1926, de fournir au pays un président de la République, ont toujours su jouer un rôle de pont entre les deux grandes familles de l'islam, présentes sur le territoire. Une communauté chrétienne multimillénaire, l'une des plus anciennes au monde, qui ne doit cependant pas sa survie à l'angélisme ou à la "solidarité" sur le mode occidental, quand on songe au nombre de paroisses qui portent ici le nom de Saint-Élie, le prophète de l'Ancien Testament, défenseur du Dieu unique devant les impies, devenu patron protecteur de multiples lieux de culte.

La volonté d'enracinement est prégnante chez les maronites

À la faveur des chaînes de montagnes du Liban et de l'Anti-Liban, barrières naturelles séparées par la plaine de la Bekaa, les chrétiens s'établirent le long de l'étroite bande côtière qui s'étend de Tyr (actuellement Sour) à Tripoli, encore aujourd'hui mieux protégés que leurs frères de foi d'Antioche (Antakya), de Syrie ou d'Irak. « Si Damas tombe un jour aux mains de Dae'ch, rappelle cependant le père Daoud Reaïdy, l'État islamique atteint Beyrouth en deux heures… » Supérieur général de l'ordre des Antonins maronites, depuis 2011, ce prêtre de 55 ans demeure au monastère Saint-Roch (Mar Roukoz), un ensemble architectural au style oriental caractéristique, fondé en 1768, qui a été élargi après la guerre civile par les moines eux-mêmes. Secondé par ses assistants, le père Daoud y mène une vie de prière et de patronage (le monastère soutient en effet une école, un centre de formation ecclésiastique, un atelier artistique et un centre d'accueil). « Ici nous existons encore dans la société, nous ne sommes pas une communauté cachée. On tient les écoles : elles sont mixtes et accueillent des gens de toutes confessions. »

La volonté d'enracinement est prégnante chez les maronites, qui ont conscience du rôle que le Liban a à jouer dans la survie des chrétiens d'Orient. Le territoire n'est cependant pas épargné par un vivace prosélytisme musulman, qui prend dorénavant les traits d'une hostilité systématique envers les chrétiens. « Depuis les années 1990, certains étudiants musulmans exigent l'érection de mosquées au sein de nos universités et de nos écoles. Ils essuient un refus catégorique de notre part. Désormais, ce sont les réseaux sociaux qui aggravent la situation, en diffusant impunément des messages qui encouragent l'extermination de nos frères. »

L'oeuvre des religieux libanais se veut pourtant porteuse d'espérance, avec la culture comme vecteur. La première imprimerie du Liban n'a-t-elle pas été créée au monastère Saint-Antoine dans la vallée de Qozhaya, dans le nord ? Les établissements scolaires chrétiens, surtout, permettent l'existence d'« une oasis de dialogue » unique au Proche- Orient, selon le père Daoud. Même son de cloche à Jounieh, chez le père Paul Naaman, de l'Ordre libanais maronite (OLM), ancien recteur de l'université Saint-Esprit de Kaslik (Usek). Sous la pluie fine, « la première, celle qu'on attendait tant », il nous a promenés dans les allées de l'université désertées par les étudiants, un 1er novembre. « Les musulmans éduqués savent depuis longtemps ce que les chrétiens peuvent apporter à leurs enfants, affirme-t-il. Une éducation à l'occidentale : l'ouverture sur le monde, bien sûr, mais aussi l'excellence dans les disciplines académiques — mathématiques, langues, histoire. » L'OLM possède 80 monastères et maisons religieuses au Liban, en Afrique, au Canada et en Amérique latine, qui constituent des centres spirituels et socioculturels d'importance. Le père Naaman détaille l'étendue de son patronage : nombre de collèges et d'écoles, ainsi que l'Usek, qui compte douze facultés, dans des domaines aussi variés que la médecine, les sciences de l'ingénieur, le droit, les lettres ou la théologie.

« Nous relayons l'État dans ce qu'il n'arrive pas à faire », affirme de son côté le père Germanos , recteur pour la sixième année de l'Université antonine (UA) (lire notre encadré), qui déplore la gabegie dans l'enseignement public. « Un étudiant de l'université libanaise coûte pratiquement le double d'un étudiant d'une université privée. » L'UA, elle, ne reçoit aucune subvention de l'État. Seuls quelques étudiants bénéficient de l'aide de la municipalité d'où ils sont originaires. La mission des religieux est sociale, quand il s'agit d'assurer la meilleure formation à un prix abordable. Elle est aussi culturelle. « Au Liban, ironise le père Germanos, on défend la langue française mieux que les Français ! Notre objectif est qu'elle continue à demeurer la langue de la culture, contre l'anglais, plus volontiers la langue des affaires. » Cursus anglophones et cursus francophones existent donc à parts égales dans les facultés de l'UA.

Il est enfin une autre mission, spirituelle, que se donnent les Antonins à l'université. C'est la plus importante.

En multipliant les chantiers, les chrétiens préparent l'avenir.

Bien que son campus principal se situe à Hadat, dans le district de Baabda, une région où cohabitent chrétiens et musulmans, notamment druzes, l'Université antonine (UA) n'en est pas moins profondément attachée à son identité maronite. Sur les cinq dernières années, les pères ont baptisé trois étudiants. Ces baptêmes se sont déroulés dans l'intimité et rappellent l'importance de l'évangélisation en ce « pays message » pour tout le Proche-Orient, comme se plaisait à l'appeler Jean-Paul II. La spiritualité ne saurait d'ailleurs être désolidarisée de la culture. « L'affaire des crèches dans les mairies, en France, c'est symptomatique, rappelle le recteur de l'université. On refuse d'avouer que le religieux est le tronc de la culture. On veut laïciser la culture, mais elle englobe pourtant la dimension sacrée de l'être humain. » Preuve en est, sur le terrain même de l'université, la construction de Notre-Dame-des-Semences, un nouveau couvent qui sera inauguré le 17 décembre prochain. Tandis que, sur la "colline antonine", ainsi qu'il est courant de la nommer, des bâtiments destinés aux étudiants sont rénovés. Il faut voir, dans la multiplication de ces chantiers, la certitude que les chrétiens sont là pour rester et qu'ils préparent l'avenir.

Depuis la fi n de la guerre que nul n'a su gagner, le territoire est constitué à 60 % de ghettos confessionnels. Sur les autres 40 %, c'est la cohabitation. Le conflit a provoqué un repli sur soi, une crispation identitaire, souvent marquée chez les jeunes générations. Dans la région de Saïda, ce sont les chiites qui dominent. Quelques enclaves chrétiennes demeurent cependant. C'est à Joun, sur les hauteurs du fi ef de Rafic Hariri, l'ancien président du Conseil des ministres assassiné en 2005, que se dresse le couvent Saint-Sauveur, maison mère de l'Ordre basilien salvatorien. Là, au milieu des oliviers, vécut et mourut en paix le vénérable père Béchara Abou-Mrad, une figure centrale de l'Église grecque-melkite catholique au XXe siècle. Nous visitons sa cellule, nous arrêtons dans la chapelle où méditent les moines et, sur le pas de la porte, croisons le chemin de vendeurs de pâtisseries et de légumes en bocaux. « Des réfugiés syriens, nous indique-t-on alors, le Liban en accueille au-delà de sa capacité. » Ils viennent s'ajouter aux réfugiés palestiniens, sans que les Libanais aient leur mot à dire.

Un peu plus loin, à Maghdouché, au sud de Saïda, se trouve la grotte d'apparition mariale de Notre-Dame-de-Mantara. C'est ici que la Vierge aurait attendu (Mantara signifie "attente") Jésus-Christ alors parti prêcher. L'épisode est relaté dans l'Évangile de saint Matthieu (15, 21-28) et le lieu a vu advenir plusieurs miracles. Cette inscription à l'entrée en anglais, français et arabe attire le regard : « J'attends mes enfants. » La messe de la Toussaint s'y déroule avec ferveur. Les femmes chantent, a cappella, la divine liturgie de saint Jean Chrysostome. Une immense statue de la Vierge se dresse à proximité. Dans les années 1990, le nombre de pèlerins présents chaque année à Maghdouché a encouragé l'archevêque de Saïda, Georges Kwaiter, à faire construire une basilique. Les Italiens et les Polonais, sarments actifs du catholicisme européen, semblent toujours les plus nombreux à se rendre sur cette terre de pèlerinage. Pour combien de temps le restera-t-elle ? « On doit refuser de baisser les bras. » Cette phrase, prononcée, quelques jours plus tôt, par le père Daoud Reaïdy au couvent des Antonins, nous revient en mémoire. Mais la profession de foi était teintée de gravité : « Le martyre importe peu. Il faut mourir de toute manière. Autant mourir pour une cause. »

De notre envoyée spéciale au Liban

mercredi 21 décembre 2016

Nun living in Aleppo: “Muslims in Syria fear for their country without Christians” - ROME REPORTS

Nun living in Aleppo: "Muslims in Syria fear for their country without Christians" - ROME REPORTS

Nun living in Aleppo: "Muslims in Syria fear for their country without Christians"

The testimony of people like Guadalupe Rodrigo is  invaluable. After almost twenty years in the Middle East, few people can give a more reliable account of what is happening in Syria.


She has seen how a bountiful and rich country is now in ruins, and she knows that one of the groups that are suffering the most are Christians. 


Sister Guadalupe believes there is a systematic targeting of Christians. This is not just one person's opinion. Facts speak for themselves. 


SISTER GUADALUPE RODRIGO

Institute of the Incarnate Word

"You can see that their first target is Christians. Their neighborhoods have suffered the worst attacks. The neighborhoods of Al-Midan, Sulaymaniyah, Al-Aziziyah. Neighborhoods in which the attacks are much more intense. Easter, Christmas. A storm of projectiles of and missiles. It is a direct attack against Christians. Killing people every day just because they are Christians."


And, according to Sister Guadalupe, the massacre of Christians is not only a humanitarian tragedy. The country's diversity and cultural life is also being destroyed. 


SISTER GUADALUPE RODRIGO

Institute of the Incarnate Word

"Muslims say it. They have told me. Muslims in Aleppo. They say 'we are worried that Christians are disappearing. What will we do without Christians. In Aleppo there are half a million Christians, and now there are barely 20,000. Muslims in Syria fear for their country without Christians. They said that it is Christians who raise the academic quality in universities. It is Christians who raise the cultural level. Christians bring values to our society. Values that we do not have, such as forgiveness. They are aware of the importance of Christians in the Middle East. More so than in the Western world."


Sister Guadalupe is one of the last Christians in Aleppo. Even though she thinks that the situation is desperate right now, the political landscape of the world is shifting in their favor, so she retains hope for a land that has lost everything. 


AG

AA

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-PR

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Allemagne: un panorama des Églises orthodoxes et orientales – Religioscope

Allemagne: un panorama des Églises orthodoxes et orientales – Religioscope

Allemagne : un panorama des Églises orthodoxes et orientales

Il y aurait aujourd'hui quelque 2 millions de chrétiens appartenant à des Églises orthodoxes et autres Églises orientales en Allemagne. La plupart d'entre eux sont des immigrés ou descendants d'immigrés, amenés en Allemagne par suite de turbulences politiques ou de la recherche de nouvelles perspectives professionnelles et économiques. Les Allemands convertis à l'Église orthodoxe, par suite de mariages ou de quêtes spirituelles, ne représentent probablement que 1% de la population orthodoxe du pays. La grande majorité des orthodoxes vivant en Allemagne y sont arrivés au cours des vingt-cinq dernières années.

Orthodoxie in DeutschlandSur cette composante non négligeable du nouveau paysage religieux en Allemagne, les informations sont les bienvenues pour les observateurs de la société allemande. Sans pouvoir remplacer ce que pourrait être une véritable synthèse, un nouveau volume apporte un recueil de descriptions et des éléments d'analyse. Plus de vingt auteurs ont participé à l'ouvrage collectif à l'ouvrage collectif Orthodoxie in Deutschland, sous la direction de Thomas Bremer, Assad Elias Kattan et Reinhard Thöle (Münster, Aschendorff Verlag, 2016). Le livre couvre à la fois l'histoire et des thèmes actuels transversaux ; les quatre derniers chapitres sont consacrés aux anciennes Églises orientales (préchalcédoniennes).

Comme le notent les coordinateurs du volume en introduction, les Églises orthodoxes se trouvent dans une étape particulièrement intéressante de leur histoire en Allemagne (comme dans les autres pays occidentaux) : le transfert de leurs traditions dans un autre environnement en s'efforçant de les préserver tout en répondant aux attentes des prochaines générations.

« Les identités ecclésiastiques nationales se transforment en une identité orthodoxe en Allemagne, qui en arrive même à poser la question d'une orthodoxie allemande. Un indicateur est fourni par l'approche des langues liturgiques, des langues maternelles et de la langue allemande dans le culte et dans la vie des communautés. » (p. IX)

Des princesses russes aux réfugiés syriens ou aux étudiants serbes, « l'histoire de l'Orthodoxie [en Allemagne] est une histoire de la migration dans ses différentes formes », observe le P. Constantin Miron (Cologne) (p. 204). S'il existe maintenant des communautés orthodoxes de langue allemande dans plusieurs diocèses, il reste à voir si l'on peut déjà réellement parler de communautés orthodoxes allemandes, ajoute-t-il.

L'établissement progressif des différentes juridictions orthodoxes en Allemagne

La partie historique évoque cette présence orthodoxe russe dès le XIXe siècle: c'est d'abord une présence de milieux russes nobles ou aisés, qui conduit à la création d'églises ou chapelles dans des représentations diplomatiques, dans des lieux de villégiature ou dans des palais (lors d'unions entre un souverain allemand et une princesse russe ; puis les turbulences politiques du XXe siècle conduisent à une émigration russe avec l'implantation de structures paroissiales et ecclésiales. Les circonstances politiques entraînèrent aussi des divisions au sein de l'Église russe : dans les années 1930, pas moins de quatre juridictions russes étaient en concurrence pour obtenir en Allemagne un statut de droit public (p. 24). Il fallut attendre la fin du communisme et le XXIe siècle pour voir ces divisons largement résorbées : l'Archevêque Marc, à la tête de l'Église orthodoxe russe hors-frontières (séparée du Patriarcat de Moscou) en Allemagne joua d'ailleurs un rôle crucial dans les efforts qui aboutirent en 2007 à la réconciliation entre les deux branches de l'Église russe, rappelle le P. Nikolai Artemoff.

Eglise orthodoxe russe de Bad Ems.

L'église orthodoxe russe à côté du château de Bad Ems rappelle une présence orthodoxe dès le XIXe siècle, mais très différente de celle que nous observons aujourd'hui (© Zackzuchowski | Dreamstime.com).

La fin du communisme a ouvert la voie à l'arrivée d'un nombre beaucoup plus important de Russes orthodoxes : en 1988, année du millénaire du baptême de la Russie, on en dénombrait environ 10.000 sur le territoire de la République fédérale d'Allemagne ; aujourd'hui, ils seraient 300.000. Le Patriarcat de Moscou a ouvert de nombreuses nouvelles paroisses au cours des dernières années : il y aurait aujourd'hui une centaine de paroisses du Patriarcat de Moscou et une cinquantaine de l'Église russe hors-frontières (l'acte d'union de 2007 ayant prévu qu'elle conserverait ses propres structures autonomes).

L'immigration serbe en Allemagne était insignifiante avant la Seconde Guerre mondiale. Mais 100.000 à 150.000 Serbes, dont 50 prêtres au moins, se retrouvèrent prisonniers de guerre en Allemagne. La plupart ne voulurent pas rentrer ensuite dans leur patrie, passée sous le joug d'un régime communiste. Dans le sillage de débuts d'organisation d'une vie religieuse dans les camps où ils avaient été détenus, de premières communautés paroissiales s'organisèrent à Munich, Osnabrück, Lingen, Hanovre et Düsseldorf, raconte le P. Radomir Kolundzic. Au début des années 1960, sept prêtres encadraient la vie religieuse de quelque 10.000 fidèles serbes en Allemagne. Par la suite, des migrants serbes en quête de travail vinrent les rejoindre : au milieu des années 1970, on comptait quelque 800.000 immigrés yougoslaves en Europe occidentale, dont 500.000 en Allemagne, et probablement la moitié de ceux-ci étaient-ils serbes (p. 46), même s'ils étaient loin d'être tous orthodoxes pratiquants. En 1969 fut érigé un diocèse serbe d'Europe occidentale, dont le siège se trouva d'abord à Londres, puis à Düsseldorf dès 1971. Avec un nombre croissant de paroisses, le diocèse fut divisé en deux en 1990, avec un nouveau diocèse pour l'Allemagne, l'Autriche et la Suisse, et finalement un diocèse pour l'Allemagne seule en 2011.

Les conflits des années 1990 dans l'ex-Yougoslavie entraînèrent de nouvelles vagues migratoires (80.000 à 100.000 Serbes) et de nouvelles créations de communautés. De plus, par suite de l'éclatement du pays et de l'effondrement du système politique qui l'avait dominé, de nouvelles interrogations et aspirations spirituelles se firent jour : un nombre croissant de Serbes se tournèrent à nouveau vers l'Église orthodoxe. 42 prêtres desservent 26 paroisses serbes en Allemagne aujourd'hui, avec un nombre de fidèles estimé à 300.000 au moins.

Chez les Russes comme chez les Serbes, les immigrés politiques de la période communiste ne constituent plus qu'une petite minorité des fidèles, remarque Nikolaj Thon (p. 53).

En plus petit nombre, les orthodoxes roumains dépendirent d'abord (dès 1949) d'un diocèse d'Europe occidentale et centrale, avant l'organisation d'une Métropole pour l'Allemagne et quelques autres pays en 1993.

En 1960, un accord fut signé entre le Royaume de Grèce et la République fédérale d'Allemagne pour permettre aux travailleurs grecs l'accès à des emplois en Allemagne. Cela entraîna une rapide augmentation de la population grecque. Un diocèse orthodoxe grec d'Europe centrale fut érigé en 1963 : les orthodoxes grecs sont aujourd'hui au nombre de 400.000 en Allemagne, avec 150 lieux de culte. C'est le diocèse «le plus grand, le mieux organisé et le mieux établi» (p. 60).

Le siège du diocèse bulgare d'abord établi à Budapest déménagea à Berlin en 1994. Il existe également une Église ukrainienne à l'étranger reconnue par le Patriarcat de Constantinople depuis 1995. Quelque 13.000 immigrés géorgiens ont donné naissance à des paroisses géorgiennes, avec leur propre diocèse d'Allemagne et d'Autriche depuis 2014. Il faut encore y ajouter les orthodoxes arabophones dépendant du Patriarcat d'Antioche : la fuite de chrétiens de Syrie est récemment venue étoffer leurs rangs, et ils rassemblent maintenant quelque 15.000 fidèles.

L'organisation de la vie orthodoxe en Allemagne

Dix diocèses orthodoxes existent aujourd'hui sur territoire allemand, en parallèle, puisqu'ils relèvent chacun d'une Église dont le siège se trouve dans un pays de tradition orthodoxe. Cependant, des structures se mettent en place en vue de permettre une coopération.

Une Commission des Églises orthodoxes (puis : de l'Église orthodoxe en Allemagne vit le jour en 1994 et pava la voie à la Conférence des évêques orthodoxes, mise sur pied en 2010. Chaque évêque orthodoxe conserve cependant sa liberté d'action, répondant à son Église mère autocéphale.

Lors d'une célébration liturgique en 2007 à Cologne, six évêques orthodoxes, entourés du clergé (source: Paroisse orthodoxe serbe de Cologne).

Dans la pratique, bien des prêtres orthodoxes liés à une Église nationale se trouvent amenés à offrir des services pastoraux également à des orthodoxes d'autres origines. Les rencontres interorthodoxes représentent une réalité au quotidien dans bien des paroisses, ou entre paroisses — parfois, d'ailleurs, comme conséquence de la participation aux dialogues œcuméniques, remarque le P. Constantin Miron (p. 206). Dans plus d'un lieu, des conférences pastorales rassemblant les prêtres orthodoxes de plusieurs juridictions ont vu le jour, permettant également une représentation commune face aux partenaires civils et religieux.

Parmi les questions importantes se trouve celle de la traduction des textes liturgiques en des langues occidentales. Le P. Peter Sonntag note que cela est devenu un objet de controverses, et que les expressions de scepticisme face à ces traductions s'expriment tant dans les pays orthodoxes (face aux traductions en langue moderne) que dans les pays occidentaux. Même si les premiers efforts de traduction en allemand remontent au XIXe siècle,ce n'est que tardivement que le caractère souhaitable d'un effort commun en vue de traductions en langue allemande s'est affirmé (p. 88). Sous l'égide de la Conférence des évêques, une commission pour la traduction de la Divine Liturgie et des sacrements s'est mise au travail en 2010 (p. 98).

Il est vrai que les écueils à éviter ne manquent pas : d'un côté le risque de traductions si proches de la langue courante qu'elles en perdraient leur caractère sacré, artistique, poétique ; d'autre part, le danger d'un style si proche de la syntaxe de la langue d'origine qu'elle en deviendrait pratiquement incompréhensible à l'audition (p. 89). Une traduction « philologiquement et sémantiquement juste » n'est pas encore une prière... (p. 92)

Le P. Peter Sontag remarque qu'un effort de traduction aujourd'hui soulève inévitablement aussi des questions de fond, par rapport aux sensibilités contemporaines sur certains sujets ( par exemple le « langage inclusif ») ou en lien avec le dialogue œcuménique (stigmatisation de certains « hérétiques » vénérés par les Églises préchalcédoniennes, variations de traduction du Notre Père) (pp. 98-99).

En ce qui concerne l'enseignement religieux orthodoxe dans les écoles publiques, celui-ci existe depuis 1956 en Bavière (pour les élèves russes orthodoxes), depuis 1985/86 en Rhénanie du Nord-Wetsphalie (pour les élèves grecs orthodoxes, mais conçu comme s'adressant en fait à tous les élèves de confession orthodoxe indépendamment de leur origine nationale). Cet enseignement existe aujourd'hui en Bavière, en Rhénanie du Nord-Westphalie, en Hesse, en Basse-Saxe et (depuis l'année scolaire 2016/17) en Bade-Wurtemberg. Les partenaires des communautés orthodoxes sont les ministères compétents de chaque Land. Une seule formation spécifique existe pour les catéchètes orthodoxes, depuis 2011, à l'Université de Munich. Il existe peu de matériaux de catéchèse orthodoxe en langue allemande adaptés pour un usage scolaire, mais l'élaboration de tels outils pédagogiques a commencé.

Comme l'explique Kerstin Keller (coordinatrice de l'enseignement religieux orthodoxe en Rhénanie du Nord-Westphalie), cet enseignement s'adresse à des enfants issus de différents groupes de migrants. « Le macrocosme de l'Orthodoxie universelle se reflète ainsi dans le microcosme de la salle de classe »   et l'enseignement doit transmettre la notion qu'il y a une foi orthodoxe et une Église orthodoxe qui se manifeste dans la diversité des expressions nationales (pp. 108-109). Leur socialisation religieuse (familiale, communautaire) s'effectue le plus souvent dans la langue du pays d'origine, tandis que l'enseignement se fait en allemand.

Dans le cadre universitaire, Athanasios Vletsis (professeur de théologie orthodoxe à l'Université de Munich) rappelle que la première chaire de théologie orthodoxe en Allemagne fut celle occupée par le professeur Anatasios Kallis à Münster, de 1979 à sa retraite en 1999, puis depuis 2005 par le professeur Assaad Elias Kattan.. Comme celle de Münster, la chaire de Munich vit le jour dans le contexte d'une faculté de théologie catholique. Cet Institut de théologie orthodoxe a compté quatre professeurs, puis trois par suite de mesures d'économie, dont l'enseignement est complété par différents chargés de cours, afin d'offrir une formation académique complète en théologie orthodoxe, couronnée par un diplôme. Il existe également un enseignement sur le christianisme orthodoxe dans le cadre de la science des religions à l'Université d'Erfurt (professeur Vasilios Makrides).

Quant aux efforts œcuméniques entre Églises historiques en Allemagne et partenaires orthodoxes, ils commencèrent dans les années 1960 et 1970, avec la croissance de la présence orthodoxe et le sentiment que celle-ci serait plus qu'une manifestation passagère. Cela inclut à la fois les contacts bilatéraux entre orthodoxes et catholiques ou protestant, et la participation à la communauté de travail des Églises chrétiennes en Allemagne (ACK). Différents diocèses orthodoxes sont également représentés dans des groupes de travail à l'échelle de Länder : dans ces cas, la liste établie par Marina Kiroudi montre que ce sont les diocèses particuliers qui sont représentés, et non des structures interorthodoxes (pp. 123-124).

Ces échanges œcuméniques portent aussi sur des aspects pratiques : par exemple les cadres régissant les mariages entre conjoints de confessions différents, avec des documents pastoraux à ce sujet publiés tant en coopération avec les catholiques (1993) qu'avec les protestants (pp. 117-118).

Il importe de souligner un autre aspect des relations entre immigrés orthodoxes et les Églises majoritaires en Allemagne : l'hospitalité accordée aux orthodoxes dans des lieux de culte et autres locaux protestants ou catholiques, courante jusqu'à la fin des années 1990, remarque le théologien protestant Martin Illert (Hanovre). Cela rappelle que les décennies immédiatement postérieures à la 2e guerre mondiale furent placées sous le signe de l'aide et du soutien aux migrants orthodoxes, souvent déplacés par la tourmente de la guerre et ses conséquences politiques. Mais depuis la fin des années 1990, alors que la population orthodoxe augmente tandis que le nombre des pratiquants catholiques et protestants diminue en Allemagne, ce n'est plus simplement la mise à disposition d'espaces pour le culte orthodoxe qui est proposée, mais de plus en plus la cession de lieux de culte reconvertis en églises orthodoxes. Les réseaux œcuméniques ont joué ici un rôle important (pp. 182-183).

Un chapitre porte sur les médias orthodoxes en Allemagne (Nikolaj Thon). À ce propos, on découvre aussi des remarques inattendues dans l'article du P. Georgios Basoudis (Mannheim) sur l'intégration des Églises orthodoxes en Allemagne, qui évoque « Internet comme facteur d'intégration » (pp. 176-177). Selon lui, pour une Église qui ne dispose pas de solides structures administratives en Allemagne et dans laquelle beaucoup de responsabilités reposent finalement sur les épaules du prêtre, le travail serait beaucoup plus difficile à réaliser sans l'existence d'Internet : les réseaux sociaux virtuels permettent une rapide circulation de l'information ainsi qu'une communication. Internet contribuerait ainsi notablement à renforcer la perception de la présence des communautés orthodoxes en Allemagne.

Russische Kirche, Wiesbaden

L'église orthodoxe russe de Wiesbaden (Miss Passion Photography).

D'autres Églises d'origine orientale en Allemagne

Outre des chapitres sur quelques autres sujets particuliers, la dernière et plus courte partie du volume s'intéresse aux Églises orientales non byzantines (et pas en communion avec ces dernières), également présentes en Allemagne.

Un court chapitre (3 pages) du P. Youkhana Patros, qui dessert une paroisse de cette Église à Essen, résume la situation de l'Église assyrienne d'Orient. Ses premiers fidèles seraient arrivés vers 1970. Ils seraient aujourd'hui 5.000 à 7.000 en Allemagne, avec cinq communautés (mais chacune comprend également plusieurs lieux de culte secondaires). L'évêque responsable de l'Europe occidentale réside à Stockholm, qui est un pôle pour la migration assyrienne en Europe. Les quatre prêtres présents en Allemagne sont originaires d'Irak. Deux ont étudié à Rome, ce qui reflète les bonnes relations développées entre cette Église et l'Église catholique romaine. L'accueil assuré par les communautés chrétiennes allemandes est vital pour cette Église, qui n'est propriétaire que d'un seul lieu de culte en Allemagne.

Les coptes comptent pour leur part 12.000 fidèles en Allemagne, rapportent  Fouad et Barbara Ibrahim. Les premiers étaient arrivés dès les années 1950, sans véritable vie communautaire ou lieu de culte, avec des rencontres sporadiques dans un cadre privé. Aujourd'hui, l'Église copte compte en Allemagne deux évêques, deux monastères qui attirent des fidèles venus parfois de loin, et même un institut de formation théologique. Plus de la moitié des coptes résidant en Allemagne ont acquis la nationalité de ce pays (p. 231).

Quant aux chrétiens syriaques venus du Tur Abdin, dans l'Est de la Turquie, ils seraient aujourd'hui 80.000 en Allemagne, explique Simon Birol (Université de Bochum). Si les premiers arrivèrent dès les années 1960, ils rentraient au pays pour les grandes fêtes religieuses et fréquentaient des paroisses d'autres confessions chrétiennes durant le reste de l'année. Un premier prêtre fut ordonné pour desservir les fidèles en Allemagne en 1971. Comme pour toutes les autres communautés évoquées dans ce livre, le prêt de lieux de culte catholiques ou protestants pour permettre la célébration des services religieux syriaques a été important. Un monastère a ouvert ses portes à la frontière germano-néerlandaise, à côté duquel se trouve le seul cimetière orthodoxe syriaque en Europe (pp. 242-243). Un autre monastère a été fondé en Allemagne, à Warburg, dans les locaux d'un ancien couvent dominicain. Consacré en 2012, l'évêque qui y réside aujourd'hui et porte la responsabilité du diocèse d'Allemagne est le premier évêque orthodoxe syriaque né dans la diaspora. L'instruction religieuse pour les orthodoxes syriaques a été instituée dans cinq Länder, même si la formation d'enseignants pose des défis (p. 248).

Quant aux Arméniens, leur présence en Allemagne est plus ancienne, rappelle Harutyun Harutyunyan. De 1925 à 1945, un premier prêtre arménien exerça son ministère au service des fidèles de la région de Berlin, puis de Stuttgart jusqu'en 1952. Plusieurs années s'écoulèrent ensuite sans présence permanente de prêtres arméniens en Allemagne. Une organisation de la vie religieuse commença à se mettre en place à partir du milieu des années 1960 et dans les années 1970, accompagnant une croissance progressive de la population arménienne, qui s'élevait déjà à 20.000 au début des années 1990. Aujourd'hui, l'Église arménienne compte en Allemagne 15 paroisses (dont trois seulement possèdent leur lieu de culte), avec 2.300 fidèles actifs. Mais le manque de prêtres est aigu : il n'y en a que 5 pour toute l'Allemagne, ce qui les contraint à de constants déplacements.

Des communautés en transition

Par l'importance des communautés et leur variété, l'Allemagne représente un champ d'observation révélateur des évolutions de la présence orthodoxe en Europe occidentale. Il souligne une fois de plus – si l'on considère notamment l'importance de ces populations et leur évolution rapide — le besoin de développer plus de recherches sur ces communautés religieuses dans les pays de l'Europe occidentale, et également des recherches sous l'angle des sciences sociales des religions : la plupart des contributions contenues dans ce volume viennent plutôt d'auteurs ayant une formation théologique.

Eglise orthodoxe russe, Francfort

L'église de la paroisse orthodoxe russe hors-frontières de Francfort-sur-le-Main (© 2014 J.-F. Mayer).

Ce résumé d'un livre contenant de nombreuses informations ne permettait pas d'entrer dans les détails : dans certaines communautés, l'adaptation à un nouvel environnement s'est aussi accompagnée de tiraillements ou controverses internes, qu'évoquent certains chapitres. Ainsi, la communauté arménienne connaît des tensions par suite de la décision d'imposer des tarifs fixes pour différentes cérémonies (mariages, funérailles, etc.) aux personnes qui ne sont pas des membres cotisants d'une paroisse (ces derniers bénéficiant de la gratuité) (p. 267). Cet exemple très concret illustre les aménagements qu'entraîne l'organisation de la vie religieuse dans un nouvel environnement.

Même si le contenu des chapitres varie beaucoup, ils montrent tous des communautés fortement marquées par des vagues d'immigration récentes, et donc encore en voie d'organisation durable. Les structures déjà mises en place sont un début : elles répondent tant aux besoins des communautés qu'aux attentes de la société allemande. Elles ne représentent sans doute pas encore le stade définitif. Le cadre allemand offre des conditions favorables à certains égards : les Églises historiques, solidement établies, se montrent accueillantes envers ces communautés chrétiennes migrantes ; le cadre scolaire allemand ouvre des possibilités de catéchisme dans le cadre scolaire. Il sera intéressant de voir comment les différents groupes chrétiens orthodoxes et orientaux trouveront, dans les décennies à venir, l'équilibre entre la préservation de leur héritage et l'insertion dans le contexte allemand.

Jean-François Mayer



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